Cela me rappelle une histoire, à
peine évoquée dans la haggadah de Pessah, en cette période printanière et
pascale. Tous les ans, nous parlons, entre autre, d’un rabbin de la période
talmudique (Eliézer si je me souviens bien). La tradition orale nous dit que ce
rabbin était très sage, profond et érudit … mais il était très jeune. Cet âge
lui posait problème ou, du moins, son apparence juvénile. Si bien qu’en une
nuit, Dieu lui fit pousser une longue barbe blanche, ses cheveux grisonnèrent
et s’éclaircirent, ses traits se ridèrent et sa voix se mis à chevroter. Il
n’avait plus aucune raison de se plaindre : il avait moins de 30 ans mais
en paraissait plus de 80. Son « assurance » était
« assurée » par Dieu. L’ironie de cette histoire ne cesse de
m’interroger et peut être est ce depuis ce temps que les écrivains paraissent
plus vieux qu’ils ne sont, tant il est vrai qu’écrivain ou rabbin c’est tout
comme.
dimanche 2 décembre 2012
jeudi 22 novembre 2012
LITTéRATURE.030_"Sans âge" (20120.03.31/15h30-15h45)
L’écriture mûrit son écrivain,
elle le vieillit, elle le rend sans âge. La première fois que je rencontrais
Bona, elle s’attendait à voir un vieillard que lui avait recommandé Claude
Vigée. J’arrivais alors à Bordeaux et nous avions juste échangé par
téléphone : ma voix avait trahi mon écriture, elle avait masqué mon âge.
C’était à l’automne 2006, j’avais alors 28 ans et ma démarche éditoriale avait
éclos deux ans auparavant.
dimanche 28 octobre 2012
LITTéRATURE.029_"Un savoir rétrospectif" (2012.03.30/18:15-18:45)
J’ai compris cela grâce à une photographie prise
par mon oncle Mario. Alors âgé de deux ans et demi, je ne sus des bribes
d’alphabet qu’à l’âge de six ans. Cependant, je me vivais rétrospectivement
déjà écrivain. Sans connaître Erasme de Rotterdam, j’en avais déjà la pause
telle que figée par Hans Holbein : le crayon à la main, la feuille posée
devant moi et le visage imprégnée par la concentration de ce que
« j’écrivais ».
dimanche 14 octobre 2012
LITTéRATURE.028_"Genèse de l'écrivain" (2012.03.30/18:15-18:45)
Un écrivain est écrivain depuis qu’il sait tenir un
stylo, un crayon, un calame … dans la main. L’écrivain se fait écrivain dès
qu’il trace des signes. Tout détenteur et utilisateur de cet outil n’est pas
écrivain pour autant.
samedi 29 septembre 2012
LITTéRATURE.027_"Lecture" (2012.03.30/18:15-18:45)
Sans la générosité primordiale,
une œuvre ne sera jamais lue. J’entends qu’elle pourra être déchiffrée
mécaniquement, elle ne sera jamais lue.
samedi 22 septembre 2012
lundi 17 septembre 2012
LITTéRATURE.025_"Une oeuvre vivante" (2012.03.30/18:15-18:45)
Il est possible de ne pas aimer une œuvre malgré
cette générosité primordiale. Il est impossible ce faisant de l’enterrer
vivante avec cette disposition. Une œuvre est Vie, elle est et demeurera
vivante éternellement, malgré les autodafés. Il faudrait pour tuer une œuvre,
éradiquer son auteur, ses lecteurs, l’entourage des lecteurs … tout ce qui fut,
de près ou de loin, en contact avec cette œuvre.
lundi 10 septembre 2012
LITTéRATURE.024_"Une adhésion a priori" (2012.03.30/18:15-18:45)
Toute adhésion a posteriori à une
œuvre n’est pas le fait de l’écrivain : elle résulte seulement d’une
faille dans l’a priori du lecteur. L’écrivain n’a pas à convaincre, il doit
fidéliser la générosité primordiale du lecteur.
dimanche 2 septembre 2012
LITTéRATURE.023_"Une générosité primordiale" (2012.03.30/18:15-18:45)
Tout lecteur, pour comprendre et
saisir les écrits d’un auteur, doit être mu par une générosité
primordiale : celle de prendre l’écrivain au sérieux, au mot, dans toutes
leurs dimensions.
vendredi 4 mai 2012
LITTéRATURE.022_"Anima" (2012.03.30/18:15-18:45)
L’écrivain est anima, il est
animé par l’anima. Il dit avec ses mots, sa langue, des faits physiques ou
psychologiques, immatériels ou non. Ce faisant, il crée, il donne souffle
vivant à son imagination, qui dès lors se meut sur les pages imprimées données
au lecteur.
samedi 28 avril 2012
samedi 21 avril 2012
LITTéRATURE.020_"Procédé de la maïeutique" (2012.03.30/12:30-13:30)
S’il convient avant tout à
l’écrivain de s’accoucher lui-même, la maïeutique peut aussi procéder de son
lectorat.
mardi 17 avril 2012
LITTéRATURE.019_"Une mort symbolique?" (2012.03.30/12:30-13:30)
Paradoxalement, le jeune écrivain
aspire à une mort symbolique prématurée : éloigner son œuvre de son
entourage, pour la donner à d’autres, inconnus, est souhaitable. Cependant, cet
éloignement ne doit pas être radical. L’écrivain est tiraillé par la
distanciation entre son œuvre et sa vie, et par le rapprochement de sa
compréhension. Cependant cette dernière ne doit pas être invasive.
vendredi 13 avril 2012
LITTéRATURE.018_"Un travail vivant" (2012.03.30/12:30-13:30)
L’écriture est un travail vivant.
La lecture ne doit pas être un acte de distanciation totale. L’écrivain, il
faut se le rappeler, est un être de chair et de sang : il convient de
côtoyer son œuvre et de rechercher sa présence. Une fois mort il est trop tard :
seuls demeurent ses écrits et éventuellement des biographies (avec ce que cela
comporte d’imperfections). Bilitis de Pierre Louyïs disait : « Ceux
qui vivront après moi / Chanteront mes strophes sans sens ».
samedi 7 avril 2012
LITTéRATURE.017_"Tout est dit, sauf la vérité" (2012.03.08/18:00-20:00)
Et tout ce qui a déjà été dit sur
l’écriture : la sublimation de la souffrance, le baume réparateur … tout
sauf que l’écriture c’est avant tout se vider de soi, par la sobre retenue ou
l’exhibitionnisme échevelé. La littérature est pieuse, elle est vœux et
réalisation de l’abstinence face à la vie … du moins celle qui se veut intègre
et honnête. Il est en effet possible d’imaginer toutes les fantaisies, dire
tout et son contraire … il n’est pas certain que les écrivains honnêtes
demeurent, non plus que leurs voies soient comprises.
lundi 2 avril 2012
LITTéRATURE.016_"Dénuement contre Plagiat" (2012.03.08/18:00-20:00)
Toujours ce destin : alors
viser le dénuement comme un moine franciscain dont les prodiges ne paraissent
fabuleux qu’à un œil extérieur, non initié et envieux. Jack sous ses dehors
agités était un grand franciscain, qui n’a fait que rendre compte de son
dénuement total. Toute la génération Beat ne sera restée qu’à la superficie de
sa vie, comme il arrive toujours dans toute démarche plagiaire.
jeudi 29 mars 2012
LITTéRATURE.015_"Un bâteau ivre" (2012.03.08/18:00-20:00)
Alors dans ces conditions,
comment concilier une addiction au sexe et la fidélité ? Si ce n’est en
devenant fou d’amour pour une personne qui ne partagerait que le premier terme
de cet antagonisme. Seule, la fidélité, même partagée, n’est qu’un ennui
majeur. Toute réciprocité complète ne serait que souffrance pour les deux. Les
deux cas pathologiques ne se résolvent que dans la domination du désir et dans
l’isolement de l’être : autres mœurs, autres souffrances. Et ne plus faire
l’amour qu’en donnant du plaisir et par compassion comme un prurit pour les
personnes qui souffrent trop. Car deux addictions au sexe ne se retrouvent
qu’en de rares occasions et ne peuvent rester longtemps ensemble : trop
d’agitation intérieure et d’appels du large. « Le bateau ivre » n’a
qu’une destination : l’écœurement, le retour et l’impuissance.
lundi 26 mars 2012
LITTéRATURE.014_"Deux pôles-Un destin" (2012.03.08/18:00-20:00)
Outre les ambitions mesquines de
la vie, pour lesquelles nous sommes capables de nous entre-déchirer, il ne
reste que deux solutions : se consacrer à l’autre ou à soi. La vie est
in-fine binaire : je n’y peux rien, même s’il est possible de naviguer
entre ces deux pôles selon ses besoins. Quoi qu’il en soit, ces choix
représentent des sacrifices : le premier sacrifie l’individu, le second
condamne à l’impuissance. Ce qui revient au même quel que soit le sens dans
lequel on le prend : cela s’appelle une identité de destin.
mardi 20 mars 2012
LITTéRATURE.013_"Des saints modestes" (2012.03.08/18:00-20:00)
Car, quel que soit notre choix,
nous finissons toujours par nous « coucher » en demandant notre
reste. Quand bien même nous serions animés des meilleures intentions et que
nous y parvenions, nous ne serions que des saints bien modestes. L’essentiel
est dans le dénuement !
samedi 17 mars 2012
LITTéRATURE.012_"Un espoir dérisoire" (2012.03.08/18:00-20:00)
Et face à ce désespoir ne me
reste que la chanson de Gilles Vigneaut : « Il me reste un pays
… » ! Et cela est déjà de trop. Cela fait renaître l’espoir et ses
rêves dérisoires. L’ambition d’être « Jack Kérouack ou de n’être
rien » dans un moment de verve hugolienne adolescente.
jeudi 15 mars 2012
LITTéRTAURE.011_"Artiste et glébeux" (2012.03.08/18:00-20:00)
Quelle connerie ce poncif sur
l’œuvre de Bach ! Une « cathédrale de notes » !!! Bach n’a
rien d’un gothique flamboyant. S’il s’élève aux cieux c’est malgré lui et dans
le dénuement s’il vous plaît. Bach retire, retranche et seule reste la note qui
touche, ici et maintenant, dans la pleine conscience de sa condition terrestre.
Ses mordants et autres ornementations musicales n’existent pas pour agrémenter
l’écoute, mais bien pour préparer et faire vibrer différemment la note choisie.
Bach, comme Jack, est un orphelin des cieux, un homme pieux par nécessité
intérieure, sans nulle vision d’avenir qui ne soit un leurre. Si n’étaient les
refuges de la musique et/ou de l’écriture, en attendant que le temps fasse son
œuvre.
LITTéRATURE.010_"Tiraillement et dénuement" (2012.03.08/18:00-20:00)
Alors je pense aux tiraillements de Jack, tels qu’exprimés par Victor Lévy-Beaulieu et Jean-Paul Loubes … et par Jack lui-même quand on sait le lire. Tiraillement qui finit par tout déchirer : le papier, la toile, les simagrées qui nous entourent et par lequel demeure le dénuement d’un Adagio de Bach (concerto pour violoncelle BWV 1042).
LITTéRATURE.009_"Tout est dit-Rien n'est fait" (2012.03.08/18:00-20:00)
Tout ce qui a déjà été dit sur l’écriture : ses fétichismes procéduriers, ses techniques jusqu’à la déconstruction… tout qui a déjà été exploré, il y a deux siècles de cela et remis au goût du jour par les « avant-gardes », la « contre-culture »… qui valent toujours mieux que les ganaches qui font métier de littérature. Les grands, les riches, mais aussi les petits, les pauvres, qui courent après la subvention, la bourse et la résidence : des managers de la plume.
LITTéRATURE.008_"les grands écrivains" (2011.11.28/16:15-16:30)
C’est d’aspirer à la vie des grands écrivains que l’on peut vouloir devenir écrivain. Mais de qui s’autorise-t-on pour fantasmer sur ces vies ? A y regarder de près, la vie des écrivains, aussi grands soient ils, est aussi banale que n’importe laquelle … et n’est pas très riche : surtout financièrement.
Laissons là d’autres arguments intermédiaires et inconsistants. Est-ce d’être immortels dans l’esprit des humains que l’on aspire à devenir écrivain ? Mais cette prétention se mérite et ce n’est pas en se payant de mots que l’on crée la phrase ou le personnage qui marqueront toutes les générations à venir. Je veux dire que la recherche formelle ne peut se suffire à elle-même pour devenir une œuvre. Cette recherche est au service d’un propos … écrit de surcroît.
LITTéRATURE.007_"le sphinx" (2011.11.28/15:45-16:15)
L’écrivain se sacre écrivain sans salamalec ; l’écrivain se fait écrivain tout naturellement ; l’écrivain devient écrivain en un déclic, lorsque le sphinx qui le torturait devient gentil minou.
Si la lutte avec les questions du sphinx demeure laborieuse alors l’écrivain s’avorte. Harassé de questions il finira par ne plus s’interroger ; matraqué de questions il niera son besoin d’y répondre. Le premier cas le menacera d’inconsistance, le deuxième de nihilisme.
LITTéRATURE.006_"un être singulier" (2011.11.28/15:45-16:15)
Pourtant, en cette circonstance, le questionnant est l’écrivain ou plutôt l’écrivain se figurant écrivain : c'est-à-dire qu’il devra encore faire un effort pour s’incarner en écrivain. Mais qu’est ce qu’être écrivain ? Un écrivain n’est pas une figure type, il se définit avant tout par sa singularité : nous pouvons alors dire qu’un écrivain est un être qui fait appel à l’écriture pour se construire singulièrement.
Or, on se pose toutes sortes de questions quand on est écrivain, car d’autres les ont posés. On apporte toutes sortes de réponses quand on est écrivain, car d’autres les ont donnés.
Or, on se pose toutes sortes de questions quand on est écrivain, car d’autres les ont posés. On apporte toutes sortes de réponses quand on est écrivain, car d’autres les ont donnés.
LITTéRATURE.005_"faire un pas de côté" (2011.11.13/23:00-23:50)
Alors il se posera cette autre question : pourquoi s’interroger sur mes raisons d’écrire ? si la question initiale est une mise en abîme du travail d’écrire, la seconde doit se comprendre comme un pas de côté pour rompre le charme. L’écrivain sinon ne pourrait plus contenir la propagation infinie des pourquoi : il pourrait s’y noyer – assécher sa plume – ou, si sa verve est assez puissante, inventer sans cesse de nouvelles réponses qui ressembleraient plus à des justifications virtuoses qu’à l’aveu de la vérité. Et dans ce mensonge organisé, l’écrivain n’y serait pour rien : le questionnant seul est responsable des réponses obtenues.
LITTéRATURE.004_"joie d'écrire" (2011.11.13/23:00-23:50)
Il sait par exemple pour l’avoir lu à de nombreuses reprises et pour l’avoir observé intimement qu’un lien profond entre souffrance et écriture existe. Et de là une logorrhée imbuvable sur les relations de causes et de conséquences entre ces deux éléments de son quotidien, qu’il organisera selon toutes les figures géométriques connues faisant intervenir deux variables ; se compliquant un peu la tâche, et ce faisant croyant compliquer les solutions, il introduira quelques probabilités d’occurrence … jusqu’à ce que sa probité et l’ennui lui soufflent à l’oreille, sur lesquelles il croyait que quelques glorieux lauriers étaient posés : « d’autres sentiments existent ».
La joie lui sautera alors au cou et devenant fou il se croira tout d’abord étranglé tant il était habitué à respirer l’air de la douleur. Après coup il prendra la joie dans ses mains et il s’interrogera. A la question : « d’où vient-elle ? », il répondra : « de mon écriture ! ». Mais il ne trouvera pas de solution au problème posé par sa joie persistante au milieu du vase clos de la souffrance – écriture.
LITTéRATURE.003_"pourquoi écrire" (2011.11.13/23:00-23:50)
Vient un moment où l’écrivain se pose la question : pourquoi écris-je? En toute bonne foi, même s’il pose un peu, il se pose avant tout la question : pourquoi écris-je? En toute bonne foi, les réponses qu’il y apportera seront fausses. Pour approcher une réponse bonne il lui faudra de surcroît se mettre à nu, à part lui, mais à nu avant que de répondre.
La fausseté des premières réponses tiendra à ses nombreuses lectures et à toutes les pages qu’il aura déjà écrites. Sans même le savoir il répètera des réponses parce qu’elles sonnent bien : leur beauté est indéniable mais ce ne seront jamais sa réponse. En toute conscience, il cherchera un maître qui lui dictera sa réponse, mais le maître s’échappera. En toute conscience il regardera derrière lui, parmi ses créations, et il croira approcher la réponse par je ne sais quelle mise à nu d’une volonté inconsciente, identifiée a posteriori.
LITTéRATURE.002_"lire, écrire, donner à lire" (2011.11.13/20:00-20:30)
Ce vice débuta bien tôt et remonte au moins à mes premiers souvenirs. Pour moi elle était la vie et je ne me rendais compte de l’antinomie des deux mots. Ayant commencé à l’écrire, elle fut, consciemment, faire valoir, puis paravent … enfin exutoire. Ce n’est que très récemment que je l’envisageai comme objet de lecture.
La lecture fut une nécessité - une ouverture à l’horizon, un accélérateur de particules … un refuge d’expériences qui, outre le sens qu’il offrait à mon esprit avide de logiques et de symétries, démultipliait les possibles très rapidement. Je franchis très tôt le pas vers l’écriture : tout d’abord réécriture, adaptation, transformation, avant d’aborder formellement la création.
LITTéRATURE.001_"appartenir à" (2011.11.13/20:00-20:30)
Quelque chose me dit que je ne suis point tout à fait en vie et qu'une partie de moi appartient à Littérature (à des heures plus riches, je peux être Musique ... mais il n'y a que Littérature qui m'appartienne en propre ; il faut être Beethoven pour s'approprier un monde de notes).
A l'heure présente je voudrais être tout Littérature, mais ce désespoir me gagne par trop - entendez qu'il est trop dangereux - pour que je ne le dilue par quelques sonates pour piano de Mozart (remède éprouvé et qui fait encore bon office). Vous me pardonnerez donc si je ne suis tout Littérature ici présent dans votre lecture.
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